Le nouveau concept de Botanic passe au-delà du naturel
Botanic a souvent un temps d'avance ! Son nouveau concept baptisé « Jardins de demain » qui va au-delà de l'offre naturelle et qui est testé à Clapiers (et Albertville) ne coûterait que 50 K€ par magasin. Et ses bons résultats sont sans doute scrutés de près par la concurrence. Par les temps qui courent, les solutions concrètes de Botanic et de Nicolas Imberti (Stratégie Jardin) ont-elles permis de « retrouver le chemin de la nature » et de la croissance ?
L’an dernier Botanic avait présenté son plan 2030 autour du « Jardin de demain » Nicolas Imberti, responsable de la stratégie et du marché jardin avait détaillé la feuille de route qui, de prime abord, nous avait paru un peu complexe à exprimer. Souvenez-vous des deux objectifs de l’enseigne : être orientée « client et usage » et assumer sa mission de "retrouver ensemble le chemin de la nature" en intégrant les enjeux environnementaux et climatiques. Jusque-là ça allait… puis Botanic rentrait dans le détail en énonçant 4 marqueurs et 5 axes. Deux objectifs, 4 marqueurs, 5 axes , c’est ce qu’on appelle une stratégie … en 3 dimensions. On ne vous dit pas la tête qu’a dû faire Aurélien Noguero quand on lui a appris que le magasins de Clapiers qu’il dirige était pressenti pour tester le concept. Mais le fait est que cette mécanique est plus simple qu’il n’y parait, pas trop chère et a bel et bien pris corps dans son magasin. Pas si « naturellement » bien sûr et on a bien compris que les équipes du siège et celles du magasin ont un peu bataillé pour faire naître ce Jardin de Demain… du sud. Oui car un autre test est en cours à Albertville pour un Jardin de Demain de montagne. Tous reconnaissent de vrais échanges avec le 3ème magasin du groupe en termes de CA ( env 10,4 M€ CA) et ses 44 salariés dont beaucoup ont plu de 25 ans de maison. S’agissait de régler finement la transformation et d’être convaincant !
Concept : 2 objectifs, 4 marqueurs, 5 axes
Dans sa vision 2030, Botanic a designé Deux objectifs : être orientée client et usage et assumer sa mission de "retrouver ensemble le chemin de la nature" en intégrant les enjeux environnementaux et climatiques
Quatre Piliers Fondamentaux :
Gestion de l'eau : Optimiser l'utilisation et la conservation de l'eau.
Développement du travail du sol : Favoriser la santé et la fertilité des sols.
Palette végétale et variétale adaptée : Proposer des plantes et variétés résistantes et adaptées aux conditions locales et climatiques.
Biodiversité sous toutes ses coutures : Favoriser et développer la vie (faune et flore) dans les jardins.
Cinq Axes de Transformation (jusqu'à 2030) :
Transformation de l'offre : Faire évoluer l'offre de produits et services.
Formation : Développer la formation interne des équipes et l'accompagnement des clients pour les sensibiliser aux enjeux des quatre piliers et aux conséquences du changement climatique.
Parcours marchand : Créer un parcours client en magasin qui reflète la vision 2030 de l'entreprise.
Communication : Adopter une communication cohérente ("faire ce qu'on dit et dire ce qu'on fait") et explorer de nouveaux territoires de discours (ex: ateliers de bouturage, tonte raisonnée) pour différencier Botanic.
Nouvelles formes de commerce : Explorer et développer des services comme la seconde main, la location ou potentiellement une offre B2B.
Un concept pour l’instant dédié au marché jardin
Comment fait-on pour appliquer cette matrice 3D du nouveau concept ? Par exemple on retrouvera dans le parcours marchand (axe n°3) le développement du travail du sol qui est le marqueur n° 2 mais traité selon les usages du clients (objectif 1) à savoir en rassemblant au même endroit les outils nécessaires des biocides et des biostimulants. Bref, Botanic influence le client à travailler le sol, le stimuler, prévenir pour éviter de guérir. De façon générale, la stratégie énoncée par l’enseigne est celle des petits pas. La transformation en « Jardin de Demain » s'opère par des actions annuelles concrètes qui nourrissent la stratégie globale.
Pour l’instant le programme concerne le marché du jardin (fleurs, pépinière, semences, outillage, terreaux, etc.), qui représente environ 43% de l'activité de Botanic mais bien 49 % ici à Clapiers ce qui l’a désigné aussi comme candidat au test. A noter enfin que le magasin choisi opère sur une zone de chalandise assez aisée et que son taux de fidélité est exceptionnel avec 72 % du CA réalisé avec des clients «encartés». Vu côté clients l’influence du concept se détectera dès le parking qui seront de plus en plusvégétalisés « L'objectif étant de développer la biodiversité et de montrer des associations végétales différentes sur les espaces extérieurs des magasins. » Ici, à Clapiers, les haies sont tellement épaisses et la végétation tellement dense que le taxi ne trouvait pas l’entrée. Pour inciter à cette végétalisation l’enseigne pousse un Trophée de la Biodiversité projet ouvert à tous les magasins et centré sur la végétalisation des parvis, encourageant chaque magasin à innover.
Le marché aux fleurs, le carrefour central
Le nouveau concept appliqué à l’univers jardin permet de repenser le "Marché aux Fleurs", la "Pépinière" et l'espace "Équiper et entretenir mes espaces extérieurs". Le marché au fleur d’abord, c’est ce grand espace central dans le magasin, véritable nœud synaptique entre la partie magasins classique et la serre. Exit les gondoles qui en faisaient un rayon comme un autre , plus de racks bouchant la vue. Dès qu’on y pénètre on a une profondeur de champ vers l’extérieur. L’endroit se veut modulable selon les saisons « racontant des histoires différentes ». Par exemple à l’automne, le marché est sur le thème de la Toussaint avec une offre puissante où dominent bruyères, chrysanthèmes, cyclamens,mais pas d’Halloween, (visiblement pas le truc de la maison). Le marché aux fleurs passera en novembre à la Sainte Catherine pour promouvoir la plantation automnale (arbres d'alignement, fruitiers), soulignant ses vertus (ombre future). Là encore tous les choix sont passés au crible des marqueurs écologiques (lire encadré).
Une marché aux fleurs adaptatif avec des inspirations mobiles
Plus tard le marché sera "Noëlisé" pour prolonger sur la partie végétale l’ univers Noël cohérent, intégrant sapins, éclairages, guirlandes, et décorations extérieures. Pour être précis, le client trraversera la zone « Noël de la maison » et tombera en poursuivant son chemin sur ce grand carrefour central qu’est le marché au fleur qui sera lui aussi « noélisé ». L'idée est d'éviter la rupture entre l'univers Noël et le végétal, en le prolongeant au jardin. » Sans gondole donc mais avec des sortes de petites maisonnettes montées sur roues, des espaces d'inspiration mobiles qui recréent des balcons ou terrasses, associant végétaux, pots et accessoires pour donner des idées aux clients et faciliter les achats complémentaires.
Des ronds-points d’inspiration
Un peu plus loin vers l’extérieur , sous la chapelle , les végétaux sont à disposition sur tables mais avec les terreaux dessous sur plateaux amovibles. Selon le directeur, les ventes de ces terreaux « cross markétés » ont progressé immédiatement. Toujours dans l’esprit d’aller vers une logique d’usage, des pergolas latérales abritent les offres de produits complémentaires (pots, treillis) jamais loin des végétaux correspondants.
Une fois à l’extérieur c’est un premier rond-point végétalisé qui nous attend. Et c’est vrai que les vrais rond-points urbains sont des lieux d’inspiration alors pourquoi ne pas en mettre en jardinerie. Celui-là, un Jardin à la Provençale, est réalisé comme une Guilde écologique à savoir un lieu d’association cohérente de végétaux, voire bénéfiques entre eux. Là, par exemple on découvre une association végétale sur trois strates (haute, moyenne, basse) avec Feijoa (strate haute), romarin, cistes, chèvrefeuille (strate moyenne), aromatiques, vivaces (strate basse). L'offre d'annuelles et bisannuelles sera réduite au profit des vivaces, moins gourmandes en eau. Les Ollas, système d'arrosage en terre poreuse, de production locale, sont disposés pour une irrigation économe. L’ensemble donne l’idée de ce qu’est le "Jardin du Fainéant".
Expériences partagées et parcours en faisceaux
En résumé Botanic jardine in situ, expérimente et partage son expérience. Encore une fois en gardant en main sa grille de « Jardin de demain » , ses 4 marqueurs, ses 2 objectifs et 5 axes. A partir de ces ronds points les allées s’ouvrent en faisceaux Thématiques, en zones d'usage claires pour le client : Jardin méditerranéen, Apporter de l'ombre et de la fraîcheur au jardin, Séparer et délimiter mes espaces (haies), Cultiver mon potager et mon verger, Composer mes jardinières et mes massifs, Créer mon jardin d'eau, Décorer et végétaliser mes espaces. De petits panneaux guident ainsi mais pas de façon trop directive. A noter toutefois que les indications à la craie sur de petites ardoises, c’est joli mais vite illisible. De toute façon les clients sont interrogés et le concept sera à nouveau réglé. Autre exemple un «rond-point- Guilde » a été considéré comme "trop sec" et risquant de donner une image de "Jardin Arizona", nécessitera donc des ajustements.
Des choix courageux
L’ensemble du concept est travaillé dans le réglage le plus fin et dans des choix courageux. Pousser la vente de grands arbres n’est pas commercialement tendance mais Botanic considère comme de son devoir de vendre des solutions d’ombrage. L'entreprise s'efforce de compenser les pertes potentielles de chiffre d'affaires liées à l'arrêt de certaines gammes par des solutions alternatives. Prenons l’exemple de la tourbe ! L’objectif est de l’éliminer de tous les terreaux d'ici 2030. C’est déjà le cas pour les plantations en pleine terre depuis une quinzaine d’année mais Botanic compte réduire aussi le pourcentage de tourbe dans les terreaux pour plantations en pots tous les deux ans (ex: passer de 60% à 40% d'ici 2026) et de l’éliminer en 2030. Pourquoi faire cela à petit pas ? Réponse de Nicolas Imberti : pour éviter de déséquilibrer le marché des matières alternatives (fibres de Miscanthus, fibres de bois) et prévenir la spéculation qui ferait augmenter les prix des terreaux. Par ailleurs, d attend que des tests scientifiques supplémentaires soient réalisés pour garantir la performance à long terme des terreaux 100% sans tourbe et éviter la déception des clients.
Quand il y a débat écologique, l’usage du client prime
A noter au passage que les terreaux qui représentent un flux client non négligeable sont placés en fond de pépinières sous une pergola latérale ce qui oblige quand même le client à une petite promenade dans la jardinerie. Faux ! répond Aurélien Noguero puisque le terreau peut être acheté en click and collect et livré en caisse. La bataille du sourcing produit s’opère aussi côté gazon artificiel : éco ou pas ? Botanic a décidé de réduire considérablement l'espace dédié au gazon artificiel en magasin (passant de quatre gondoles à pratiquement deux), elle ne le supprimera pas entièrement. « La préférence est donnée aux solutions alternatives vivantes et végétales, explique Nicolas Imberti, mais on maintient le gazon artificiel est maintenu car il répond à un usage client spécifique (balcons, terrasses) pour lequel le client estime ne pas pouvoir faire mieux. »
Mais, en l’espèce l'entreprise s'engage à améliorer la durabilité de son offre de gazon artificiel : il sera 100% issu de matériaux recyclés et 100% recyclable, contrairement à d'autres offres sur le marché.
Alcôves au-delà du naturel
L’ensemble des parties jardin manufacturées a été réorganisée en alcôve au sein du mgasin. L’alcôve par exemple de la gestion de l’eau avec récupérateurs, arrosage mais aussi paillage , l’hivernage, et tout ce qui a trait à la réduction de la consommation d’eau. Comme on l’indiquait en début d’article on retrouve aussi une alcôve « Nourrir et travailler le sol » qui regroupe des outils, des engrais et des amendements. Tout cela est fait au détriment des ancienne zones comme l’alcôve Jardine au Naturel". L’enseigne a creusé le sillon du bio mais tout le monde joue dans cette catégorie désormais. La différenciation doit se faire par la pertinence de l’offre produits spécifiques en développant par exemple les gammes de biostimulants et la stimulation préventive des plantes. Ce n’est plus d’être bio qui compte mais bien la façon de l’être.
On se forme, on fait sur place on montre en magasins plutôt que de s'exprimer de manière trop "militante" ou clivante, « évitant de culpabiliser les consommateurs », conclut d’ailleurs Karine Peltant , responsable communication de la marque « L'objectif est d'accompagner les clients de manière positive et pédagogique ». Au bilan ce nouveau concept a pu faire perdre du CA dans certaines zones : des déplacements de produits peuvent entraîner des baisses temporaires comme le jardin aquatique dont les ventes ont chuté de 15% après déplacement mais le mix produits a conduit à une croissance globale positive du magasin (ex: marché aux fleurs à +5% sur un CA bien plus important que l’aquatique , magasin à +1,5% au printemps par rapport à la moyenne régionale), même avec des conditions météorologiques défavorables.
Extension du domaine de la lutte
La vision 2030 sera progressivement étendue aux autres marchés de Botanic (Maison, Animal, Personne), le marché du jardin ayant juste une année d'avance. Le magasin de Clapiers deviendra également un site pilote pour les évolutions des marchés "Maison" et "Personne" à partir de l'automne prochain. Enfin, cinq magasins supplémentaires seront rénovés, un par région, pour tester le concept sur diverses configurations (pépinière en L, magasin large et peu profond, etc.) Brétigny (Sud Paris),Villesuétie (près de Troyes), Montbonnot (près de Grenoble), Pépinière de Bavent (près de Caen), Camblan (Bordeaux). Un nouveau concept plus économique car à 50 000 euros par magasin pour les pilotes, il coûte 7 à 8 fois moins que le concept 2018.
Après une année de test sur ces 7 magasins, le concept sera déployé sur l'ensemble du réseau en trois ans. Seul le magasin de Louvigny , dans le Calvados, le plus performant en CA du réseau à 12 M€ sera rénové dans une phase ultérieure.
Botanic en chiffres
Botanic, Société à Mission, compte 70 magasins intégrés et 6 franchisés. La stratégie actuelle se concentre sur le renouvellement des parcs existants, la rénovation des concepts et la réalisation de travaux. Toutefois un nouveau magasin est en construction à Camblanes-et-Meynac (Bordeaux), son ouverture est prévue pour le 4 mars. Il intégrera les nouveaux concepts "Jardin de Demain" et sera de taille moyenne-plus (environ 6 500 m²).
Les magasins ont en moyenne entre 5 000 et 6 000 m² et réalisent un chiffre d'affaires moyen de 5 à 7 millions d'euros, soit environ 1 000 euros par mètre carré.
A 12 millions d’euros , le magasin de Louvigny (près de Caen) est le plus performant en termes de chiffre d'affaires,
Le magasin de Clapiers est à environ 10 millions d'euros, grâce à son emplacement, son excellence opérationnelle et son statut d'institution locale.
Répartition du CA par marché :
Jardin (pépinière, fleurs, semences, outils, etc.) : 43-44%
Animal : environ 20%
Maison (incluant le végétal d'intérieur) : 18-19%
Personne (produits bio, bien-être, phytothérapie, alimentation naturelle) : 13-15%
Le végétal (intérieur et extérieur combinés) représente environ 25-30% du chiffre d'affaires global.
Origine des produits : Engagement sur la provenance (76% d'origine France pour la pépinière, objectif 80%), et une stratégie de relocalisation (privilégier l'Europe, puis la France, puis la région).