L’avis client comme outil managérial- Spécial Table ronde #3
Une fois que le client a donné son avis, quelles sont les conséquences sur le magasin, les collaborateurs ? Les invités de notre table ronde sont tous d'accord : c'est un outil de management positif... pas une matraque
Ils ont participé à notre table ronde : Céline Zuliani (responsable expérience client Castorama), François Chardon (directeur marketing digital ITM EM), Marlène Berger (directrice générale Vasano),
Bertrand Kinche (directeur commercial Odrea), Caroline Bonhomme (directrice marketing Henkel), Raymond Tanguy (directeur Galec brico jardin), Paul de Basquiat (leader expérience client Leroy Merlin), Pierre Dieuzeide, Anne Leguillier, Laurent Feneau(Zepros Habitat).
Zepros Habitat : Vous évoquez souvent l’avis Google comme outil managérial, mais est-ce qu’il n’y a pas un risque de mettre le bazar dans le magasin?
Paul de Basquiat (Leroy Merlin): C’est un levier d’animation managériale parce que savoir féliciter les collaborateurs, pointer les points d’attention quand il le faut, c’est aussi essentiel. Mais en faisant attention au biais, aux difficultés que ça peut générer.
Zepros Habitat : Quel type de biais?
Paul de Basquiat: On n’est pas à l’abri de tomber sur un client ou un vendeur qui n’était pas en forme ce jour-là. Ça nous est tous arrivé! Est-ce que le client ou le vendeur doit être jeté à la vindicte publique, pointé du doigt, etc.? On doit être vigilant ! Google n’est pas l’alpha et l’oméga de notre expérience client, de notre relation client. Il y a un tas d’autres choses qu’on ne voit pas, qu’on ne va pas lire dans Google et qui se passent par ailleurs.
Zepros Habitat : Peut-on retirer les noms des avis google pour justement ne pas pointer du doigt un salarié?
Céline Zuliani (Castorama): Les avis Google étant publics, ils sont affichés sur Google tels que les clients les écrivent et on ne peut pas les filtrer. Les magasins reçoivent les avis tels qu’ils sont publiés par les clients. Nous avons mis en place une procédure en cas d’avis discriminant et il nous est possible dans ce cas très spécifique de signaler l’avis à Google pour en demander la suppression.
Paul de Basquiat: La question de l’anonymisation des avis s’est posée pendant un temps. Autrement dit, on ne voulait pas restituer des avis nominatifs, tel quel, à nos équipes parce que potentiellement, cela peut en effet pointer du doigt sans connaître la réalité des faits. Nous avons pivoté parce qu’on s’est rendu compte que ce point n’était pas avéré et qu’en termes de volume, les avis qui nomment un collaborateur sont négligeables. Cela prouve que c’est sain, ça permet de tous progresser.
Zepros Habitat : Céline Zuliani, avez-vous vécu des difficultés avec les syndicats sur ces partages d’avis Google?
Céline Zuliani: Pas que je sache. Quand un client cite nominativement un collègue dans un avis, on s’en sert surtout pour faire du feedback positif aux équipes! Nos métiers du commerce sont difficiles, il faut être en permanence auprès du client, être dans l’écoute, dans la réponse aux besoins. Avoir un retour positif client, c’est un vrai moteur pour nos équipes, donc on le partage.
Zepros Habitat : Il n’y a donc pas de management… négatif?
Céline Zuliani: Encore une fois, une expérience déceptive avec le flux de clients qu’on a dans nos magasins, ça peut arriver. On s’en sert pour dire à une équipe qu’il y a eu un point d’insatisfaction à ce moment-là et identifier ensemble ce qui s’est passé, comment on peut le traiter. Ça fait partie de l’intérêt d’écouter les clients!
Zepros Habitat : François, comment se servir des avis comme outil de management?
François Chardon (ITM): Dans un réseau d’indépendants, c’est compliqué d’avoir une politique commune managériale, mais je peux d’ores et déjà dire quasiment sûr à 98% que non, ce n’est pas la matraque qui anime au quotidien les adhérents dans le management de leur équipe. C’est même plutôt le contraire. Les avis servent un management positif : si l’expérience et l’avis sont bons, cela veut dire qu’effectivement on va faire plus de chiffre… l
Comment gérer sa e-réputation avec des partenaires
Zepros Habitat : J’ai une question rapide sur le partage de l’expérience client avec des partenaires… Se mesure- t-elle, est-elle abîmée?
Paul de Basquiat (Leroy Merlin): Un partenaire de Leroy Merlin agit également au nom de la marque Leroy Merlin. Parfois, la différence est assez ténue, donc le client ne le sait pas forcément, parfois c’est le dernier maillon de la chaîne dans l’expérience du client, donc c’est potentiellement la dernière trace que va garder le client. Une nouvelle fois, ce sont des choses connues, partagées dans tous les marchés, ça se formalise bien, évidemment.
Zepros Habitat : Avez-vous eu de mauvaises expériences avec des partenaires?
Paul de Basquiat: Oui, il y en a eu et il y en aura, c’est inhérent à notre métier. Mais nous avons une démarche d’amélioration collective. Nous cherchons forcément à pouvoir sonder les clients qui sont en contact avec nos partenaires. Et là, tout l’enjeu est de s’assurer que le client ne sera pas sur-sollicité par nos partenaires, par nous en parallèle, etc. Ça peut vite être l’enfer pour le client.
Zepros Habitat : Mais quelle alternative donner à son partenaire logisticien?
Paul de Basquiat: Nous souhaitons maîtriser directement les sondages auprès de noc clients, pour solliciter qui il faut et comme il faut. Souvent, le client vit le questionnaire comme «justement vous me demandez mon avis, je vous déclare un problème donc puisque vous êtes venu à moi, je comprends que vous êtes à l’affût pour savoir si ça s’est bien passé et le cas échéant, pour me répondre». Il est donc indispensable que nous pilotions directement les enquêtes clients.
Zepros Habitat : Quand une enseigne comme Leroy Merlin crée un shop-in-shop dans un Weldom, comment gérez-vous l’intrication des expériences clients?
Paul de Basquiat: Beaucoup de tests sont faits. Vous posez la bonne question, à savoir quand on vient positionner la marque Leroy Merlin dans une autre enseigne dans une autre marque… est-ce qu’on s’assure que les valeurs de l’enseigne sont bien respectées? C’est plutôt ça, le point de vigilance à ce stade. Aujourd’hui, ce n’est pas encore un enjeu trop structurant, mais ça pourra assez vite le devenir et nous devons être prêts. Comment gérer sa e-réputation avec des partenaires