Avis de tempête dans le bricolage ?

Pierre Dieuzeide
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Avis de tempête dans le bricolage ?

Jean-Eric Riche demande des états généraux entre distributeurs et fabricants dénonçant les coups subis par les industriels. Le président d’Inoha avertit que « le point de rupture » entre fabricants et distributeurs n’est pas loin. En cause : la mauvaise conduite supposée d'une grande enseigne de GSB qui n'est autre que...

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... Leroy-Merlin ! En général la Nuit d’Inoha se déroule dans une ambiance a minima feutrée et si quelques piques se déclenchent, c’est à fleuret moucheté. Mais c’était "Black Thursday", ce jeudi soir, sur la péniche qui a embarqué industriels et distributeurs. Il y avait comme qui dirait du roulis sur la Seine ! Après les traditionnelles remises de prix Inoha aux industriels les plus méritants, par Valérie Dequen (déléguée générale d'Inoha), c’est Jean-Eric Riche qui a pris la parole au non des fabricants. Et là, le champs lexical a été pour le moins inhabituel : « anxiété », « dégradation du moral », « inquiétude », « difficulté », « défiance », mais également « point de rupture ». La gorge du président est nouée. Et dans un silence de cathédrale, il rappelle à l’auditoire que les industriels ne cessent de subir des coups. Et de citer, tour à tour, les distributeurs qui massifient (on pense bien sûr au One Kingfisher), à ceux qui « deviennent fabricants » (GoodHome et autres), et pour lesquels les industriels « seraient cantonnés au rôle de sous-traitants… »

La "bonne conduite" de Leroy Merlin

Tout cela, c’est déjà connu. Mais la goutte d’eau qui fait déborder le vase, c’est le retrait de la "clause Code de bonne conduite" des contrats 2020 par un célèbre distributeur que Jean-Eric Riche se refuse à citer. Mais on sait déjà qu’il s’agit de Leroy-Merlin. Là, c’est trop, pour les industriels ! On rappelle que ce Code de bonne conduite existe depuis longtemps entre distributeurs et fabricants français (FMB et Inoha/ex-Unibal). Il régit nombre de points, dont les délais de préavis de déréférencement. Avec plus de temps donné au fournisseur pour se retourner en cas de rupture avec le distributeur. Ce code a été revu en 2014… Quand le leader du marché enterre unilatéralement cette clause, c’est quasi un casus belli.

Un électrochoc, sinon…

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Le président d’Inoha de parler d’ « électrochoc » nécessaire. Sinon ? Sinon... le marché du bricolage « deviendra comme d’autres , celui du sport par exemple » où les fabricants vendent en direct. « Si nous n’y prenons pas garde, le fossé entre distributeurs et fabricants deviendra infranchissable (…) et les industriels deviendront distributeurs ». « Le point de rupture n’est pas loin ! », alerte Jean-Éric Riche qui rappelle que dans certains domaines les fabricants représentent déjà 1/3 des ventes en ligne.Un argument qui pourrait d’ailleurs lui être retourné par les distributeurs. Ce discours très sombre qui ressemble à un cri de désespoir face au monde qui change s’achève par un appel constructif : celui d’organiser des Etats généraux entre les deux univers fabricants et distributeurs pour éviter la défiance et « donner de la visibilité à tous ». Jean-Eric Riche est applaudi et va s’asseoir. L’assistance reste assise ; plus personne sur la scène. Personne n’ose bouger et, finalement, le président d’Inoha se relève et vient au micro. Avec un sourire : « Oui, pardon ! Que la fête commence ! »

Des réactions mitigées

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Fournisseurs et distributeurs sont au moins d’accord sur un point : ce président d’Inoha est "quelqu’un de bien" ; son discours émouvant. Après les analyses divergent : la plupart des distributeurs pensent au sujet du changement du marché qu’on ne peut s’opposer à l’histoire. Mathieu Pivain , président de la FMB, présent, ne veut pas réagir à chaud et annonce que le sujet des états généraux sera débattu avec le conseil d’administration de la FMB. Il est évident que, parmi les fabricants, les patrons d’entreprises françaises sont tous derrière leur président… Les entreprises internationales sont plus réservées. Comme dit Valérie Dequen,déléguée générale d’Inoha, « il n’y a pas de guerre : notez-le bien ! Mais une volonté de paix ». On le note bien.On note aussi que si guerre il y avait, l’entreprise qui pourrait tirer les marrons de ce feu naissant pourrait être ManoMano. Sur le bateau Inoha , jeudi soir, une demi-douzaine de ses représentants était là avec, en tête Christian Raisson, son cofondateur, qui rappelle que si les industriels veulent devenir marchands, la porte de sa place de marché leur est ouverte. Pierre Dieuzeide
Pierre Dieuzeide
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