Home Index de Leroy Merlin, mode d'emploi

Le scoring écologique et social des produits, le fameux « nutriscore » des équipements brico et jardin de la maison, c’est le sujet dont tout le marché parle. On sait que la maison est un grand consommateur de dépenses énergétiques, de produits au cycle carbone quelquefois catastrophique. Par la voie de sa directrice générale déléguée chargée de l’offre, Marie Simunic, Leroy Merlin révèle travailler cette question depuis bientôt 3 ans. Quel système de scoring appliquer pour ne pas être injuste, partial, faussement écolo ? L’enseigne du nord raconte être passé par les plus grands spécialistes de l’Onu au cabinet Mazars (etc). Les mots clés qui reviennent dans la bouche de Marie Simunic sont congruance, solidité , pertinence. Merci d’abord car cela nous a permis de (re)découvrir la congruance (qui convient, qui s’applique à une situation) .

Leroy Merlin a voulu tout prix éviter le « green washing » et son lot de bad buzz. Quitte à renoncer à « scorer » l’empreinte carbone ! Alors que ManoMano se focalise dessus (Carbone Score) et que probablement Kingfisher devrait en faire son cheval de bataille. Marie Simunic réemploie le terme de « congruence », de solidité de l’index et que ce n’est pas possible « aujourd’hui de scorer l’empreinte carbone des produits à la référence ». « Nous devons être les plus factuels possible » bien sûr notre index prend en compte la nature des matières premières, les lieux de production mais toujours sur des critères tangibles . Leroy Merlin d’ajouter : le système de notation pointe du doigt les évaluations les plus faibles, critère par critère, dévoilant ainsi les leviers d’action possibles pour optimiser la performance environnementale et sociale de chaque article. Le travail des enfants en usine c’est pistable mais pas l’ empreinte carbone à la référence selon le leader du marché 26 critères et une note sur 100

Au final ces critères « tangibles » sont au nombre de 26 répartis sur 6 familles. Chacun est noté entre 0 et 100. (voire encadré ci-dessous) sans qu’il y ait de critères ou de familles plus importants que d’autres. La moyenne des critères de chaque famille donne la note de la famille et on en déduit la note globale du produit ( voir exemple ci-dessous)

Home Index évalue aujourd’hui l’ensemble des marques propres Adeo commercialisées chez Leroy Merlin « Cela représente près de 35 000 produits A ce stade, 6 % des produits évalués obtiennent un score A (la meilleure note) 32 % affichent une note B, 49 % ont une note C et 13 % une note D (pas de note E). » Une notation, selon les critères les évaluations et les contrôles sur des audits , voire sur du déclaratif. Aujourd’hui, Leroy Merlin communique officiellement sur le Home Index et s’ouvre à tous les fournisseurs ! « Ce n’est pas une injonction » , rassure Marie Simunic. « Les fournisseurs peuvent refuser qu’on rende publique la note. Nous leur demanderons l’autorisation ». En revanche si le fournisseur ne fournit pas toutes les informations du cahier des charges sa note sera de -1 par défaut et elle apparaitra sur l’étiquette avec un tiret. « Après il est vrai que si le fournisseur ne veut pas du tout jouer le jeu du home index, nous privilégierons ceux qui veulent jouer »

En résumé, Leroy Merlin ne vous élimine pas en cas de mauvaise note, il échange avec le fournisseur sur les leviers qui vont lui permettre de faire progresser la note. Au bout de six mois , si le fournisseur se refuse à engager toute amélioration il sera probablement déréférencé. Marie Simunic explique toutefois que jusqu’à présent l’accueil des fournisseurs a été excellent. Il est vrai que certains fabricants rencontrés chez Inoha reprochent de vivre « dans une jungle de cahier des charges à remplir » et verraient d’un bon œil que le leader du marché donne le la, et initie un cahier des charges commun.

En aval les notes auront une influence sur le commerce. Leroy Merlin envisage des ventes en tête de gondole de produits A ou B. … on peut s’attendre à des opérations un peu Eco Maison avec des produits à l’ home index positif poussés sur le devant de la scène. En revanche, l’étiquetage ne sera pas sur les packagings pour la bonne et simple raison que la note peut évoluer. Une ampoule notée A ne le sera peut-être plus demain car une innovation technologique l’aura entretemps ringardisée. Tous les produits sont condamnés à glisser dans le classement par l’amélioration des conditions de fabrication ou par l’innovation .

Qu’est-ce que ce home index va changer dans les relations entre Adeo et ses fournisseurs ? « C’est une co-construction, explique Marie Simunic, une exigence mutuelle. Nous ne sommes plus seulement sur une négociation prix mais des engagements à plus long terme », même sur du cobranding comme dans le cas de Leroy Merlin Hansgrohe. Le home index donnera aussi des chances à de plus petits fournisseurs, plus agiles. « Le home index ouvre le champ des possibles pour ceux qui veulent travailler avec nous. Avec le home index nous sortons de la négociation classique intense par le haut » Est-ce que ce home index condamne le sourcing chinois ? « Non pas forcément... les grandes usines chinoises n’auront pas les plus mauvaises notes. Nombre d’entre elles sortent de l’énergie fossile et ont des comportements très vertueux »

Quand aux autres distributeurs , Marie Simunic leur ouvre à nouveau la porte : « nous pouvons être coopétiteurs, partager le home index avec tous » Pas sûr qu’elle soit entendue mais comme elle le partagera déjà avec Weldom, sa marketplace sans doute Bricoman à terme et toutes les enseignes d’Adeo, ça fait déjà du monde. Mais pourquoi ne pas imaginer Adeo adopter le « carbon score et Mano Mano le home index qui seraient complémentaires ? Au fait ? Pourquoi ce home index maintenant ? « D’abord pour permettre aux habitants de vivre mieux mais aussi pour ne pas se faire surprendre on prend les devants. Nous avions éliminé le glyphosate avant l’obligation ! ». A l’heure des CIL (carnet d’information du logement ) et autres DPE (Diagnostic de performances énergétiques) , Leroy Merlin porte sa brique à l’édifice histoire de faire partie de la construction et ne pas la subir.