Internet : séance rattrapage pour les jardineries (Table ronde #5)
Cette table ronde se termine avec l’influence d’Internet sur le monde du jardin post-Covid. On aurait pu commencer par là ! Les lignes numériques ont bougé comme jamais... pour une distribution qui n’est pas toujours armée de la même manière. Si Leroy Merlin trône, les autres cravachent derrière, mais avec des ambitions non dissimulées... voire surprenantes.
L’œil de Roland Motte
Atmosweb
Depuis la crise Covid, nous avons télétravaillé, acheté en ligne et communiqué. Des accros ! Toutes les ventes en ligne explosent et si on regarde un peu les chiffres sur les jardineries- graineteries, 85 % d’entre elles ont un site internet ; 42 % ont un site vitrine (sans activité de vente), 58 % ont un site de vente en ligne, 89 % sont présentes sur un ou plusieurs réseaux sociaux, 82 % l’alimentent au moins une fois par mois, ce qui est aberrant... 73 % proposent la livraison à domicile. 65 % proposent le click & collect*. Dans ce monde numérisé, les nouveaux experts ne sont plus Nicolas le Jardinier, Patrick Mioulane ou Patrick Glémas ; les nouveaux influenceurs sont Marvin, Marion Botanical, ils maîtrisent la communication, peut-être un peu moins le jardin... Ils s’adressent en tout cas à leurs consommateurs et c’est pas plus mal. D’ailleurs, les marques les courtisent et développent beaucoup de choses sur les réseaux sociaux, ils en ont fait une priorité. Sur Instagram, ils s’adressent à des influenceurs comme Marion Botanical et Vertbobo, qui interviennent pour eux sur Facebook : on fait des Facebook Live avec des consommateurs plus âgés.
* Étude réalisée par Xerfi pour Val’hor – juillet 2021 auprès de 647 points de vente jardinerie et graineterie, hors LISAS.
Karine Lagier, InVivo Retail : Aujourd’hui, le digital représente 3 % de notre CA avec plus de ventes sur Gammvert.fr qui bénéficie d’un historique plantes- et-jardin.com. Pendant les périodes de confinement, le e-commerce a évidemment connu une accélération très forte, notamment pendant les périodes de fermeture partielle de nos surfaces de vente.
Céline Vanthournout, Leroy Merlin : Évidemment, le jardin fait partie des sujets qui sont couverts par nos vendeurs sur la marketplace. Le site web a franchi l’année dernière, pour tout Leroy Merlin, le cap du milliard d’euros de chiffre d’affaires, donc on a vraiment monté d’un cran sur cette partie digitale, et donc sur la partie jardin, on est plutôt à plus de 15 % du chiffre qui est fait en ligne.
Céline Vanthournout, Leroy Merlin : Naturellement, le mobilier de jardin ou la piscine sont des secteurs qui ont un taux de pénétration digitale très fort. Encore plus avec la marketplace puisqu’il faut avoir une grande profondeur d’offre pour être présent sur le marché. Donc ce sont vraiment ces catégories-là aujourd’hui qui tirent le haut du panier. Après, ça peut être aussi des sujets comme les abris de jardin, qu’on expose beaucoup moins dans nos magasin, et qui se vendent prioritairement par le biais du digital.
Franck Mauxion, OLG : Et même très importante depuis le confinement ! D’ailleurs nous avons notre propre site marchand.
Franck Mauxion, OLG : [rires] On ne peut pas dire cela, ça vient en plus de notre activité. Nous visons 5 millions d’euros de ventes en ligne à cinq ans. Autrement dit, cela n’aura pas d’impact sur le marché. Ces ventes nous aident à avoir une meilleure connaissance des attentes du consommateur pour proposer à la vente des produits qui ne sont pas sur le marché aujourd’hui. Ainsi, on teste de nouvelles gammes et on étend notre offre. Par ailleurs, notre site nous aide à servir les marketplaces et à faire
bénéficier à nos clients d’un très bon SEO. Notre très forte croissance en ligne se fait sur les abris de jardin, mais on développera aussi les terrasses et les produits connexes.
"Nous limitons notre présence sur les marketplaces [...]. Notre business se réalise d’abord avec nos clients." Olivier Morel, Nortene
Olivier Morel, Nortène : Si, bien sûr, parce qu’on estime que notre business se réalise avec nos clients d’abord. Nous avons un parti-pris qui est très fort là-dessus en limitant notre présence sur les marketplaces. Bien sûr, nous accompagnons certains d’entre eux sur la stratégie Web d’offre avec une accélération des livraisons de contenus absolument prioritaires. D’ailleurs, d’ici quelques semaines, nous lançons NorteneForYou.com, un portail BtoB pour mettre notre contenu à disposition des magasins, avec des accès dédiés. Ainsi, par exemple pour la pose de panneaux, le vendeur pourra utiliser notre configurateur pour savoir de quel type et de quel nombre d’accessoires il a besoin. Depuis six ans maintenant, on développe aussi les contenus pédagogiques sur les réseaux sociaux, les communautés de jardiniers et sur nos propres réseaux. Et je rajouterai que nous travaillons sans relâche la data sur nos produits, parce qu’aujourd’hui, sans data fiable, vous n’apparaissez même plus sur les sites de vente en ligne... C’est du temps caché, et du travail caché, mais la data pèse très lourd dans nos équipes aujourd’hui.
Florence Valcke, botanic : Je pensais que Truffaut allait passer avant moi ! (rires) Nous sommes au début de l’histoire, en pleine transformation digitale. Nous sommes très concentrés sur l’évolution de notre modèle et notamment sur la question suivante : « Comment mailler ces nouveaux canaux pour mieux répondre aux attentes clients et pousser les murs de nos magasins, en positionnant nos vendeurs au cœur de tout cet éco-système. » Mon challenge, consiste à ne pas opposer notre magasin avec notre commerce digital, mais bien être dans le commerce unifié. Mais pour le moment, nos performances digitales restent modestes.
Florence Valcke, Botanic : Oui, nous l’avons toujours, elle s’appelle « Mon conseiller ». Effectivement, vous avez une question, un souci, un besoin de conseil pour une plante, vous prenez une photo, vous l’envoyez via l’appli en l’accompagnant de votre demande et un expert botanic vous répond. Ce sont nos vendeurs qui prennent la parole avec leurs mots, leurs connaissances, et qui apportent des conseils. C’est un régal en tant que consommateur d’avoir cette réponse personnalisée de nos experts.
Florence Valcke, botanic : Oui, bien sûr que nous en avons un, si on ne se donne pas d’objectif de chiffre d’affaires, on ne peut pas l’atteindre! Mais nous le gardons pour nous...
"Aujourd’hui, le digital ne représente que 3 % de notre CA." Karine Lagier, InVivo Retail
Catherine Jousse Truffaut : C’est un peu trop tôt pour en parler, mais effectivement nous étudions cet équipement pour nos équipes afin qu’ils puissent proposer l’offre internet complémentaire à l’offre disponible en magasin.
Karine Lagier, InVivo Retail : Pour compléter ce que dit Catherine, ce qui est très intéressant à observer, c’est qu’on a différents types de consommateurs. Il y en a qui sont évidemment plus web-acheteurs que d’autres. Mais on a surtout de plus en plus de consommateurs, qui selon leur type d’achat, selon leur moment de vie, vont faire des choix différents. Tu parlais, Catherine, de commerce unifié, d’omnicanalité... Chez InVivo, on parle beaucoup de parcours omnicanal sans couture. Ça demande beaucoup d’investissement de back-office, de logistique. L’enjeu, c’est de donner le choix à tous nos consommateurs. À tout moment, pour tout achat, qu’il réside ou pas à proximité d’un de nos magasins. Il est vrai que nous bénéficions d’un maillage territorial très fort... Pour autant, tous les Français n’habitent pas à 2 km d’un Gamm Cert, d’un Jardiland, d’un Delbard. Donc l’omnicanalité contribue à toucher tous les Français.
"Chez Mr.Bricolage, le parcours jardin en ligne est quand même assez mature, mais nous travaillons sur le développement LDF." Laurent Le Goc, Mr.Bricolage
Catherine Jousse, Truffaut : Notre site bénéficie d’une forte fréquentation d’internautes à la recherche de produits, de promos, de conseils, d’idées, d’inspirations et d’actualité. Ce visitorat nous amène de la fréquentation en magasin, via le click & collect, et de l’achat en ligne sur nos zones de chalandise et en hors zone.
Laurent Le Goc, Mr.Bricolage : Nous, chez Mr.Bricolage, le parcours jardin en ligne est quand même assez mature. Nous travaillons sur le développement LDF (livraison directe fournisseur) pour rendre nos produits encore plus accessibles pour nos clients. Et nous travaillons naturellement sur le contenu et les fiches produits. Ce sont des attentes très importantes exprimées par nos clients.
Hachemi Bouredjli, Bricomarché : Notre site ne s’oppose pas au point de vente, tout au contraire : il est indissociable et complémentaire, ça nous permet de vendre des produits comme les abris, ce qui nous libère de l’espace en magasin pour mettre en place les assortiments par usages et réenchanter nos clients à chaque visite. Cela nous permet de proposer des clés d’entrée sensorielles, car le végétal reste une rencontre sensorielle pour nos clients.
Hachemi Bouredjli, Bricomarché : Oui, et aussi Racetools. Les deux sites ont un certain savoir-faire et vont sûrement nous apporter beaucoup.
Raymond Tanguy, BBJ Leclerc : L’Internet chez Leclerc est en chantier, parce qu’historiquement, on avait dix-sept sites web, chaque concept avait son site. Le gros chantier consiste donc à regrouper tout sur un site unique. Pour répondre à la question du chiffre d’affaires, on a la chance d’être multi-circuits : GSA, GSS, donc sur ces circuits, on fait un peu plus de 15 % de chiffre d’affaires sur le jardin. Notamment drainé majoritairement par les produits jardin au drive, donc on jouit de cette possibilité pour le consommateur de jongler entre les différents sites. Pour ce qui est du maillage du territoire et des livraisons, avec plus de 700 magasins en France, nous avons potentiellement demain 700 magasins de vente et de stockage. Donc effectivement, le digital est un grand enjeu chez Leclerc. Pour terminer, on estime que sur le marché du bricolage et du jardin, le futur chiffre d’affaires se répartirait ainsi : un tiers en GSA, un tiers en GSS, et un tiers sur Internet.